[Badgirlz-list] [FWD]French antiracist feminists criticize 1…

Delete this message

Reply to this message
Author: Two girl's brains-list
Date:  
To: badgirlz-list
CC: l38squatter
Subject: [Badgirlz-list] [FWD]French antiracist feminists criticize 17 October women's rights demo in Paris


On 17 October 1961, in Paris, over 300 Algerians were killed by the
French police. In an open letter, documented below, some French
antiracist feminists criticize the choice by many feminist
organizations of 17 October as the date for a demonstration for
women's rights in Paris and the fact that the events of 17 October
1961 are not mentioned in any of the publications calling for the
demonstration. The critics see this treatment and this choice of date
as symbolically setting up anti-colonialism and feminism as separate
issues, as contributing to the denial of French society concerning its
colonial history and its consequences, and as not contributing to a
feminism "that takes into account the multidimensional aspects of
domination".

*****************************************************************************

Le 17 octobre une manifestation féministe unitaire?


Le 17 octobre prochain, le CNDF (le collectif national pour le droit
des femmes) et les
Femmes solidaires, avec le soutien de plus d'une cinquantaine
d'associations et de
partis politiques ont choisi d’organiser une manifestation nationale
pour les droits des
femmes. Nous, qui sommes des femmes et des lesbiennes qui avons traversé en
militantes des espaces féministes, estimons que le choix de la date
est fort inapproprié,
voire insultant.
Aussi pensons-nous qu’il est politiquement nécessaire de se
positionner, de rappeler
avec les associations et les personnes qui se souviennent que la
République Française
s'est bâtie sur son empire colonial, que le cette date est désormais
inséparable de
l'année 1961.
Nous nous souvenons du 17 octobre 1961
Ce jour-là, à Paris, à l’appel du FLN, suite à l’interdiction faite à
tous les Algérien.ne.s de la
capitale de circuler la nuit, des filles et des femmes sont descendues
dans la rue avec leurs
camarades de combat, leur père, leurs frères, leurs soeurs, leur mère
et leur mari. Ce jour-là,
pour la première fois, des filles et femmes algériennes ont manifesté
une résistance anticoloniale
« en métropole ». Ce jour-là, dans les rues de Paris, plus de 300
Algérien.ne.s ont
été tué.e.s par la police française, sous l’ordre du préfet Maurice Papon.
Depuis 1991, le 17 octobre est destiné à la commémoration. Mais pas seulement.
Car ce jour-là témoigne également de la difficulté à faire connaître
et reconnaître les faits
survenus, à faire admettre publiquement par les autorités la réalité
du massacre perpétré par
l'Etat. Symbole de l'invisibilité de la lutte anti-coloniale, d’une
histoire qui s’écrit à peine,
cette date rappelle aussi que la répression coloniale sévit toujours,
sous d’autres formes mais
avec une brutalité tout aussi insupportable.
En choisissant cette date, les organisations qui appellent à la
manifestation pour les droits de
femmes se désolidarisent des femmes issues de l’immigration coloniale
et postcoloniale.
Elles forcent ces femmes à choisir entre deux luttes, alors même que ces deux
luttes ne sont qu’une seule et même oppression pour elles. Elles
dissocient les luttes
féministes des luttes anti-coloniales, par-là même, ce ne sont pas
seulement les femmes
issues de l'immigration qui sont sommées de choisir, mais toutes.
Faut-il préciser qu'aucune mention de la répression de 1961 n'apparaît
dans l'ensemble des
publications qui appellent à la manifestation pour les droits de
femmes ? Rien, ni sur tracts,
ni sur les pages web. Pas un mot non plus en réponse aux
interrogations de certaines d'entre
nous sur ce curieux choix. Défiler à une heure différente du
rassemblement annuel ne peut
suffire à le légitimer. Car l'occupation de la date est signée
symboliquement. La couverture
médiatique, qui sera donnée au rassemblement proposé par le CNDF, si
faible soit-elle,
empêchera de fait le 17 octobre 61 de résonner dans les mémoires.
Quoique dominées parmi
les dominants, les organisatrices coloniseront cette date historique.
La violence de ce traitement nous est insupportable. Construire une
manif pour les droits des
femmes en prenant en compte l'événement du 17 oct.61 aurait donné une
autre teneur à
"l'unité" politique. Cela n'est pas apparu aux organisatrices/teurs
comme une nécessité
politique. Cette nécessité s'impose à nous avec une telle évidence que
nous nous étonnons
qu'elle ne se soit pas vécue par l'ensemble des associations.
La mémoire collective agit sur le présent politique, certains
événements ne peuvent pas être
effacés ou recouverts. L'unité de lutte féministe ne peut se faire que
dans la prise en compte
les aspects multidimensionnels de la domination, et non dans
l'écrasement des combats
passés. Nous ne voulons pas d'un féminisme de l'oubli et des
parenthèses mais d'un féministe
combattant l'ensemble des oppressions.
Choisir le 17 octobre, pour organiser une manifestation sans attache ni rappel
aux événements de 1961, c'est participer au déni généralisé de l’histoire de la
résistance au colonialisme, c'est court-circuiter le combat de restitution de la
mémoire mené par les générations issues de l’immigration coloniale et
postcoloniale.
Choisir cette date, c'est occulter les résistances passées et actuelles, avec
la violence sourde qui caractérise les dominants. En cela, c’est une forme de
racisme.
Vous, qui prenez position en faveur de cette lettre,
Nous, qui l'avons écrite
Ne participerons pas passivement, au prétexte
d'unité et de rassemblement, à cette manifestation
du CNDF-Femmes Solidaires, parce que cette
journée a été volée à d'autres...
Nous espérons être nombreuses à trouver par des actions créatives, par
des prises de paroles,
l'inscription de la nécessaire articulation des luttes, l'expression
de notre désaccord face à
cette grande amnésie sélective. Nous marcherons d’autres jours,
d’autres nuits, contre les
violences faites aux femmes, qu’elles soient violences coloniales,
racistes, lesbophobes,
sexistes, violences de place, de classe.

Frink, Inès, Isabelle Laetitia, Sabine, Shirine...